Accouchement traumatique: pourquoi des femmes disent « merci »

Franz Stuck, Medusa, 1892.

Il arrive que des femmes victimes d’un accouchement traumatique et de violences obstétricales remercient les soignants dans les instants qui suivent la naissance.

Après avoir subi des actes relevant de la torture et de la barbarie, tels qu’une révision utérine à vif, des mutilations sexuelles ou divers assauts douloureux sur leur corps, elles racontent avoir été paralysées par la violence durant l’accouchement, puis avoir dit « merci » à l’équipe médicale dès la fin de leur calvaire. Certaines femmes l’ont parfois fait avec insistance. D’autres ont même remercié l’équipe pendant toute leur reconduite de la salle d’accouchement jusqu’à leur chambre, où elles se sont effondrées dès qu’elles se sont retrouvées seules. Par la suite, elles ont éprouvé de la honte, de la culpabilité ou de la colère d’avoir remercié les soignants.

Bon nombre d’entre elles ont du mal à expliquer ce qui les a poussées, à cet instant, à dire merci à leurs agresseurs, certaines donnant comme raison une tentative de retrouver un peu de dignité.

Les soignants eux-mêmes font part de ce phénomène, en évoquant des patientes qui les remercient copieusement suite à leur accouchement, puis qui leur envoient quelques semaines plus tard un courrier détaillant les sévices subis et exigeant explication et réparation. Il n’en faut pas plus pour qu’ils qualifient ces femmes de versatiles, de névrosées, voire de malhonnêtes cherchant à obtenir des dédommagements après avoir appris sur internet l’existence des violences obstétricales.

Certains obstétriciens se vantent même d’obtenir des remerciements des patientes qu’ils brutalisent, comme le fait le Dr C. sur la liste de diffusion de Gyneweb, relayé par la revue Spirale :

« Je suis un adepte de ces claques d’accouchement. Une franche claque sur la fesse quand la femme n’a plus pied avec la réalité. Elle est perdue dans sa peur plus que dans sa douleur. L’accouchement se passe alors tranquillement ensuite. Elles disent toutes : “Merci docteur, et pardon”, aucune des autres (ou si peu) ne dit merci. »

Pour comprendre ce phénomène, il est utile de se tourner vers la victimologie et ses aspects relevant de la psychotraumatologie. Les psychiatres observent des attitudes paradoxales chez les personnes victimes d’agressions exceptionnellement violentes. Certaines d’entre elles peuvent avoir une réaction immédiate inadaptée pendant quelques minutes jusqu’à quelques heures, pouvant se présenter sous quatre formes : la sidération, l’agitation, la fuite panique et l’activité d’automate. Dans le cas de l’agitation, le sujet agressé et stressé a envie d’agir, mais son stress est trop intense pour lui permettre de bien comprendre la situation et d’élaborer une décision. Il libère alors sa tension anxieuse dans une décharge motrice sauvage et désordonnée : il gesticule et profère des propos incohérents. Dans le cas de l’activité d’automate, l’individu semble avoir un comportement normal, il effectue des gestes cohérents, mais un observateur exercé remarquera que ses gestes sont répétitifs et inutiles, ou dérisoires et peu adaptés à la situation.

Même si aucune étude n’a porté sur le comportement de victimes de violence obstétricale dans les instants qui suivent un accouchement traumatique, une hypothèse serait que ces remerciements s’inscrivent dans ces réactions immédiates inadaptées. Le fait d’asséner des remerciements de façon exagérément démonstrative pourrait s’apparenter à de l’agitation post-traumatique. Répéter un merci, le visage figé, en se conformant à ce que l’institution médicale attend d’une femme qui vient d’accoucher, pourrait aussi entrer dans la catégorie d’activité d’automate.

Quoi qu’il en soit, depuis le syndrome de Stockholm où des otages prennent fait et cause pour leur ravisseur, jusqu’au phénomène d’identification à l’agresseur, il est observé que le psychisme humain s’adapte à une situation de violence extrême en provoquant des réactions paradoxales qui peuvent sembler opposées à l’intérêt de la victime.

Indépendamment de l’explication clinique de ce phénomène, le fait de remercier avec insistance les médecins immédiatement après la naissance de son enfant, est en soi anormal. En effet, dans les instants qui suivent un accouchement respecté, la jeune mère plane dans un état de béatitude. Plongée dans un bain hormonal, elle est détachée du monde extérieur pour observer son nouveau-né et échanger avec lui regards et caresses. Tels deux amoureux, ils baignent dans un ravissement unique. Dans ces instants si exceptionnels où la femme profite de son extase, il ne lui vient pas à l’idée de remercier l’équipe médicale qui, pour que les choses se passent au mieux, devraient s’éclipser. Les remerciements viendront plus tard, dans les jours qui suivent, lorsqu’elle aura peu à peu repris pied avec la réalité.

Comme je l’ai démontré dans mon billet La mère et la putain dans la salle d’accouchement, mettre au monde son enfant est un acte sexuel, puisque les mêmes organes, les mêmes hormones et une mécanique similaire entrent en jeu. Immédiatement après une relation sexuelle, il semblerait incongru, presqu’effrayant, qu’une femme assène à son partenaire « merci, merci, merci, merci beaucoup, vraiment merci » le visage pétrifié, les yeux hagards et le sourire figé. Ces remerciements intempestifs martelés au moment où elle devrait savourer en silence ce moment de félicité post-coïtale, seraient clairement le signe d’un problème grave. Cette manifestation de gratitude déplacée n’a rien à voir avec le texto « merci pour cette nuit torride » qu’on envoie à un amant depuis le métro le lendemain matin en se rendant au travail.

Suite à un accouchement violent, il serait préférable que les sages-femmes et obstétriciens évitent de se complaire dans une satisfaction tranquille lorsqu’une jeune mère les remercie au lieu de s’intéresser à son nouveau-né. Ils devraient au contraire interpréter ces paroles comme le signe avant-coureur d’un syndrome de stress post-traumatique, d’une dépression post-partum et de difficultés futures dans la relation entre la mère et son bébé qui vont se déclencher par la suite. Plutôt qu’un sourire satisfait chez les soignants, ces remerciements doivent susciter l’effroi.

Sources:

N. Chidiac, L. Crocq , « Le psychotrauma. II. La réaction immédiate et la période post-immédiate », Annales medio-psychologiques, 2010.

Sokhna Fall, vice-présidente de l’association Mémoire traumatique et victimologie, « Causalité circulaire et coresponsabilité. Pour une autre approche des violences ».

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31 Responses to Accouchement traumatique: pourquoi des femmes disent « merci »

  1. Myriam says:

    Bel article encore une fois.
    Je me suis toujours mal expliqué mes remerciements que je leur ai accordé. Mon hypothèse à moi à toujours été que j’étais trop sous le choc et épuisée pour réagir. J’avais l’impression d’avoir failli mourir, j’avais l’impression qu’accouché était quelque chose d’effroyable et je ne realisais pas à quel point on m’avait enlevé tous mes moyens de pouvoir gérer par moi-même cet évènement. J’ai été déclenché aux hormones ce qui explique en gros ce schéma. Au risque de me répéter, tout de suite après “l’agression”, un de mes visiteurs m’a balancer :” Puis la péridurale c’était pas si pire que cela!” Et moi ne sachant pas quoi dire et voulant mal-à-droitement à quelque part me défendre j’ai dit: “J’ai super mal au dos où l’aiguille “. C’est sans doute une réponse inappropriée et vraiment mal construite de ma part étant donné que j’ai normalement de la facilité à m’exprimer et argumenter. Moi et mon conjoint on a même trouvé sur le coup qu on avait un service 5 étoiles lol. Bon faut dire sont toujours sur notre cas alors cette réponse s’explique facilement… Et même 4 mois plus tard, par pitié ou je ne sais trop quoi je me sentais obligé dans ma lettre de dire que malgré cette expérience violente les employés ont pris soin de moi..?

    Merci pour cet article éclairant bien entendu la recherche et l’approfondissement sur cet état psychique post-traumatique n’est qu’à ses premiers pas.

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Merci Myriam pour ton témoignage. <3

    • Emma Maza says:

      Hier 15 juin par hasard j’allume la télé sur TV 5 émission sur les accouchements, et voilà que la présentatrice recommande aux télespectatrices de ne pas parler de leurs accouchements pour ne pas affoler les futures méres : voilà comment continue la légende “souffre et toi-toi” !
      Mes fils ont trente ans et je suis encore en colére
      Merci pour vos articles

  2. As says:

    Bonjour
    Moi je n’ai pas remercié mais je leur ai dit avec beaucoup d’entrain et de sincérité que j’allais bien, que tout s’était bien passé. Je voyais la surprise dans leur regard, eux qui m’annoncaient une déchirure complète du périnée.
    Moi je me voyais comme une rescapée car avec mon vaginisme je pensais que je “méritais” de mourir à l’accouchement et donc rien que le fait d’être envie, c’était merveilleux.

    C’est en voyant plus tard que des mamans qui avaient accouché en même temps que moi pouvaient aller se promener au centre commercial 4 jours après la naissance que j’aimerais commencé à comprendre que ce n’était pas normal de souffrir autant. Et de reprendre grâce à internet l’ensemble des actes (déclenchement, péri..) ayant mené à cette situation.
    Donc il ne faut pas rejeter l’argument présenté par les gynecos : oui c’est grâce à internet que j’ai compris qu’il n’était pas nécessaire de me charcuter pour accoucher et Alors ? Ça n’enlève rien de la gratuité des gestes invasifs que j’ai subi à cause d’hôpitaux à la recherche d’une maîtrise d’un processus naturel et d’une productivité inhumaine

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Merci pour ton témoignage As.
      En effet, il y a des femmes qui prennent conscience par internet de ce qu’elles ont vécu. Et comme tu le dis, ça n’enlève rien à la responsabilité des obstétriciens.

    • Saouli malika says:

      Bonjour possible pour vous de me contacter svp j’ai vécu le même accouchement que vois besoin de parler

  3. Flore Bellefontaine says:

    Merci Marie-Hélène…comme d’hab, tu fais mouche! Ta plume synthétique et ciselée rend ces « mercis » du post-partum encore plus effrayants…j’en ai des frissons.
    J’en profite pour compléter ton article avec une petite recherche sur le sens et l’origine du verbe “remercier” que j’avais faite dans le cadre de mon TFE sur le mépris* (* “Du mépris dans l’entretien…à l’entretien du mépris” – Face à une problématique de mépris, quel pourrait être le rôle du CCF ? -conseiller conjugal et familial- ) (dans ce travail je développe le mépris des “usagers” envers les “intervenants” et réciproquement! 😉

    Petite analyse sémantique des différents sens du verbe « remercier » :
    1) dire merci, témoigner quelque reconnaissance, rendre grâce
    2) se mettre à la merci de (être taillable et corvéable à merci), demander grâce, accorder
    grâce, donner le coup de grâce
    3) renvoyer, licencier, congédier.

    Il me semble que dans la situation qui nous occupe ici, celle du post-partum quand violence obstétricale il y eu, les trois compréhensions du mot trouvent sens:
    1) la réaction socialement conditionnée de dire merci à ceux qui nous ont « aidée » ;
    2) dans cette situation d’extrême fragilité et de « porosité » hormonalo-affectivo-physique, la femme brutalisée en disant merci, p-être ne fait-elle que de souligner cette situation de déséquilibre et d’abus dont elle a été victime, où elle s’est trouvée à la merci des soignants;
    3) et ce faisant, elle n’a plus qu’un souhait, une envie: les congédier, les renvoyer pour enfin pouvoir se retrouver avec elle-même, et parvenir à se rassembler, se recentrer.

    voilà ma petite contribution du jour! 😉

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Excellent Flore. Je n’avais pas pensé à toutes les significations du mot « merci ». Effectivement, être à la merci des soignants puis vouloir les congédier suite aux violences, c’est tellement plus proche de la réalité qu’un remerciement sincère. Très bien vu !

  4. lenvers says:

    « Je suis un adepte de ces claques d’accouchement. Une franche claque sur la fesse quand la femme n’a plus pied avec la réalité. Elle est perdue dans sa peur plus que dans sa douleur. L’accouchement se passe alors tranquillement ensuite. Elles disent toutes : “Merci docteur, et pardon”, aucune des autres (ou si peu) ne dit merci. »

    cette citation me laisse incrédule et sans voix!!! je t’en mettrais bien des claques sur les fesses moi histoire de te remettre les idées en place par une petite secousse sur le fondement.

    sur le “merci”
    peut-être que ce merci si bien interrogé et posé comme singulier peut être un signe qu’on reprend la main, qu’ on se replace en situation de sujet; cela renvoie au sens: congédier.
    “merci on vous écrira”, un merci antiphrase?

    je pense aussi au proverbe: “baise la main que tu ne peux mordre”

  5. Aixur says:

    Je pense que cette interprétation est vraie dans disons 5 % des cas. Mais dans 95 % des cas, je crois que c’est surtout que la femme a du médecin l’image d’un sauveur, tout simplement. Ils ont un peu la même image que les pompiers. Donc, logiquement, la femme remercie ce qu’elle pense être son bienfaiteur. Et bien sûr, elle le fait d’autant plus qu’elle vient de sortir d’une situation ultra-émotionnelle (comme quelqu’un qui aurait été sorti des flammes au dernier moment par les pompiers).

    Et elle le fait aussi d’autant plus que ça s’est mal passé et qu’elle a été charcutée. Parce que, pour la femme (et tous ses proches), le fait de l’avoir été signifie que l’accouchement était à problème ; et donc qu’elle ou son enfant aurait pu mourir ou être handicapé(e), etc… Mais, heureusement, elle a été “sauvée” par les médecins. D’où remerciements répétés et chaleureux.

    Mais, évidemment, si jamais elle a un doute et qu’elle se renseigne sur Internet en allant au-delà des sites officiels, là, tout change. Grâce à des sites comme le votre (au passage, merci pour cet excellent travail), elle se rend compte qu’elle a été arnaquée et violentée. En conséquence de quoi, elle l’a très mauvaise (à raison).

  6. Cleamolette says:

    Ne serait-ce pas aussi une façon de surcompenser le caractère brutal et traumatique de l’événement et de la relation aux soignants, en tentant par ces mots de remerciements, de désarmer la violence, de réinjecter du “positif”, de la douceur, de l’humanité ? De la même façon que le corps sécrète des endorphines quand on a mal ou qu’un chat souffrant ronronne (je ne compare évidemment pas les femmes à des animaux, c’est l’image qui m’est venue à l’esprit pour illustrer ce processus), on prendrait ainsi “le contre pied” de la situation de violence… En ce sens la réaction ne serait pas si inappropriée que cela, on pourrait même supposer qu’elle permet sur le moment (= à court terme, pendant qu’on est encore sous le choc et pas en situation de faire valoir ses droits dans une démarche construite) de supporter ce qui s’est passé, comme un baume antalgique à l’effet provisoire.

  7. Baboulinette says:

    Toutes les études montrent que les médecins sont des charlatans qui ne pensent qu’au pouvoir et à l’argent. 70% de psychopathes d’après la dernière en date. Il est pourtant clair que la personne la plus a même de savoir ce qu’il lui faut ou non c’est le malade, on en sait quand même plus sur nos corps que ces personnes et c’est pas leurs études payés par la société et les laboratoire pharmaceutique qui fait d’eux des experts. Si une femme dit qu’elle a pas besoin d’episiotomie ou que c’est pas encore le moment de faire sortir le bébé faut respecter sont point de vue ! Ça a toujours fonctionné comme ça et il me semble pas qu’on parlait de violence obstetricales au 14eme siècle à ce que je sache ! Non non c’est une invention bien moderne de gens qui croient tout savoir alors que les patients en savent bien mieux qu’eux d’ailleurs c’est valable pour toutes les spécialités. J’ai une ami à qui ils proposent une Chimiothérapie pour un soi disant cancer sauf qu’elle le ressent pas du tout comme ça ! Elle est en pleine forme, ils vont la rendre malade avec leur truc toxiques. Bref faut laisser le libre choix aux patiente de comment on veut accoucher et surtout quand et surtout ne pas speeder le processus ça sert à rien. Moi par exemple les médecins me disent que j’ai un trouble spychique… Genre ils savent mieux que moi ! C’est fou non ?

  8. Souriau says:

    Mon premier enfant est né par césarienne non nécessaire en 1978, aussi 9 ans plus tard j’ai dû mener un véritable combat pour accoucher en 1987, par voie basse avec une sage-femme à la maison, j’ai eu ensuite ma fille en 1990, très facilement, aussi à la maison. Tout cela sans épisiotomie.
    En 2001, j’ai dû subir une hystérectomie et là, alors que j’étais loin de m’y attendre, le chirurgien a pratiqué sur moi, sans m’avertir, une épisiotomie qui ne s’est jamais refermée.

  9. valerie ruiz says:

    Salut à toutes 🙂 , moi ils m’ont tellement démontée que j’ai mis plus de trois semaines à pouvoir me levée de mon lit et marcher quelques pas plus ou moins normalement…..
    Je me suis enfuie de la ” clinique” 3 jours après dans un état de presque morte mais je savais que si je restais 1 jour de plus ils allaient me “finir” ….
    Comment j’en m’en suis tirée?
    Je leurs ai pétée un plomb et foutue le bordel dans leur clinique :):):)
    Et oui histoire vrai de fin Janvier 2003
    Bisous à toutes
    Valérie

  10. Estelle says:

    J’ai jamais remercié la gynéco du 1er accouchement, son forceps à vif, ses mensonges, son incompétence.

    J’ai remercié, et surtout félicité, la sage-femme qui s’es occupée du 2e accouchement, m’a traitée avec respect, a réussi à ne presque pas déchirer malgré le gabarit du bébé, a su trouver les mots utiles pour m’aider lors de l’expulsion, etc.

    Mais remercié normalement, je veux dire. ni plus ni moins que quand je sors du resto et que c’était super bon, que quand un artisan fait un chouette boulot, etc.

    Enfin bref, je pense que le témoignage du médecin es claques sent quand même pas mal la mauvaise foi.

  11. viv says:

    La notion de remerciements “paradoxaux” est intéressante, mais leur généralisation comme marqueurs de dysfonctionnement me paraît abusive. Toutes les jeunes mères ne “planent” pas au point de perdre contact avec les soignants, leur conjoint(e)…

    Un point manque par ailleurs sur ces différents messages, c’est la question de l’urgence. Personne n’ira s’amuser à faire une révision utérine pour le plaisir d’affirmer son pouvoir sur le corps d’une parturiente. Une hémorragie de la délivrance, c’est un accouchement qui se passe bien, un tout petit filet de sang qui persiste et trois minutes plus tard la poche de recueil dépasse le demi-litre. En trente secondes c’est le branle-bas de combat, il est nécessaire d’annoncer ce qu’on fait mais clairement, ce n’est pas le moment de perdre de précieuses secondes à expliquer le déroulement de la procédure, mime à l’appui… Ce qui n’empêche pas d’y revenir une fois le danger écarté. Même situation pour les transfusions sanguines, en routine on vous informe et on recueille votre consentement, mais si vous venez de subir un grave accident de la route on vous transfusera d’abord et on débriefera après. Enfin, je l’espère pour vous.

    Je vous rejoins sur la nécessité justement de dépister et questionner les jeunes mères sur ces accouchements mal vécus, de façon précoce.

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Quand j’évoque ces remerciements “paradoxaux”, je vise ceux émis par des femmes qui, après coup, regrettent de les avoir fait. Ce ne sont pas tous les “mercis”.

      Concernant l’urgence, il faut vraiment relativiser les choses. L’écrasante majorité des urgences sont liées à la façon dont sont organisés les hôpitaux. Si une sage-femme était en permanence auprès d’une femme qui accouche, et n’avait pour seul fonction que de l’accompagner, le nombre d’urgences vitale chuterait. L’accompagnement “une femme – une sage-femme” est une recommandation validée par la science pour augmenter le nombre d’accouchements qui se passent bien. Pour plus de détails, je vous renvoie à ce billet-ci http://marieaccouchela.blog.lemonde.fr/2015/03/18/le-mythe-de-laccouchement-qui-derape-en-quelques-secondes/

  12. Charlotte says:

    Torture, barbarie, mutilations sexuelles… et même viol ?!!! J’ai moi-même eu un premier accouchement très compliqué, et le personnel soignant aurait très certainement pu faire mieux, surtout dans l’accompagnement, mais de tels qualificatifs me semblent totalement inappropriés et délétères… A force de se sentir victime de tout, ne se sent on pas très malheureux ?

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Ces mots proviennent de femmes. Elles ont ressenti leur accouchement de cette façon. Pour la plupart, elles sont au contraire soulagées d’avoir pu mettre de tels mots sur ce qu’elles ont vécu et avoir pu se faire entendre.

      Peut-être que vous, personnellement, n’en ressentez pas les choses de cette façon. Tant mieux si votre ressenti n’est pas aussi violent.

  13. Lili says:

    Ben quand vous souffrez comme une folle depuis des heures, qu’on vous a médicalisée à outrance et qu’autour de vous c’est la montée d’adrénaline, les 3 premières minutes où vous avez votre bébé sain et sauf dans vos bras, sans le bruit et 6 personnes autour, le merci c’est surtout “merci d’avoir mis fin à ce bazar…” Franchement à partir d’un certain niveau de violence, toute personne qui l’arrête, fut-ce la même qui l’a déclenchée, suscite un merci réflexe qui est surtout l’expression du soulagement…Après on a le temps de se rappeler que en effet, on s’est trompée de destinataire du merci…

    • RUIZ says:

      Ouais , cela me rappel un truc, en fait je crois bien aussi que finalement , mon bébé (sorti au ventouses au dernier stade de leur connerie) à foutu lui aussi le bordel , d’ailleurs je pense que c’est lui qui à commencé:):):) et moi ben , j’ai suivi son programme ( en effet, maintenant il poursuit ses études d’ingénieur informatique)
      Enfin on s’en ai tiré à peu prés sain et sauf et voilà ( pour combien de temps, on sais pas trop….) :):):).
      Bisous à toutes
      Valérie

  14. valerie ruiz says:

    Un dernier pour la route
    Pour toutes les futures mamans et afin d’échapper au problème que les labo pharma ont prévu pour vos bébés en 2018 ( style les 11 vaccins obli…) ben perso et avec mon expérience, je vous dirai tout simplement pour celles qui flippent , d’allées accoucher en Espagne ou en Belgique ou en Scandinavie , bref dans un pays qui n’oblige pas les Mamans à utiliser leurs bébés comme potentiels cobayes.
    Ni vu ni connu je t’embrouille et cela évitent des futurs procès qui n’aboutiront jamais.
    Et puis qui sait, les maternités limitrophes sont peut-être plus sympas , vous me direz.
    Bisous à toutes
    Valérie

  15. ARGALON says:

    Accouchement tardif du WE!
    Col ouvert à 9! Bon, va falloir accoucher, ma petite dam, pcq il faut que j’aille dormir…
    Sage femme sur un tabouret en train d’appuyer sur mon ventre pour faire descendre le bébé.
    Ventouses qui dérapent. Oups!
    Un peu de sang par terre et je dis à mon homme de faire attention de ne pas marcher dedans!
    Finalement, tout s’est bien passé mais c’était super limite. Dangereux pour le bébé et moi. Limite au niveau pratiques médicales.
    Cela ne m’a pas traumatisé pour autant. Les accouchements ne sont jamais anodins.
    Et en fonction de nos sensibilités de chacunes, je sais bien qu’à situation identique, les réactions seront différentes!
    Et le gynéco a pu aller faire dodo avant 1h00 du matin!

  16. Christine Z.Collin says:

    Il y a près de quarante ans ,lors de mon premier accouchement ,ma voisine de chambre s’est fait gifler par le gyneco car elle” perdait les pédales” ..elle avait 19 ans ,avait perdu un premier bébé à cause d’une éclampsie donc toutes les raisons d’être perdue et il l’a giflée..Malgré mes 20 ans j’ai dit au gynéco”vous me touchez je vous tue”car pour moi rien ne justifie cette violence. pour le reste ,mes 3 accouchements ont été “corrects” ,avec péridurale et pas trop de dégâts.je croyais que les choses s’étaient améliorées ..quand ma fille a accouché il y a 6 ans ce fut une boucherie pour le deuxième a accouché en maison de naissance et ça a été mieux ..et il y a 5 jours la fille d’amis a tout subi :la claque ,la péridurale arrachée ..Oui oui ..le point du mari (non demandé par le mari)la mise au sein non accompagnée etc..c’est d’une tristesse ..

  17. Delphine says:

    Bonjour, j’arrive ici longtemps après la publication de cet article, mais il résonne tellement avec moi que je souhaitais apporter ma pierre à l’édifice : le lendemain de mon accouchement (horrible, avec une prise en charge déplorable à tous les niveaux), j’ai abondamment remercié les deux sage-femmes venues prendre de mes nouvelles dans ma chambre. Je me souviendrai toujours de leur regard un peu interloqué devant mon insistance à les remercier de ce qui n’a été qu’un gigantesque ratage (ratage pour moi car conclu heureusement par la naissance de mon fils en bonne santé). Pour moi c’etait une façon de tourner la page, de couper court à la conversation, et d’etre enfin tranquille avec mon fils et mon conjoint. La preuve que ce n’est pas si simple ? Aujourd’hui enceinte de mon 2eme, je suis une thérapie pour me débarrasser du traumatisme infligé par leur traitement.

    • Myriam says:

      Bon courage Delphine.
      J’ai eu un superbe deuxième accouchement j’ai fait beaucoup de travail sur moi, de l’hypnose de la relaxation ça a bien marché pour moi. Mon conseil, allez dans le sens de ses désirs, ne pas avoir peur de se réapproprier ce moment. Bonne chance

  18. isabelle says:

    Cela me fait clairement penser au syndrome de Stockolme : ce syndrome où la victime a étrangement des sentiments de reconnaissance pour son agresseur. On l’ observe chez un individu resté sans défense, fragilisé, exposé a la domination d un agresseur. En réalité il s agit d’ un mécanisme psychologique de survie qui vise à protéger la victime. Mais bon psychologie et obstétrique ça fait 3. Il est donc effectivement malvenu que les soignants tirent une satisfaction de ce phénomène.

  19. Alia says:

    J’ai eu un accouchement traumatique et j’ai effectivement remercié tout le monde, cet article m’a particulièrement intéressé. Je ne sais pas médicalement parlant où mettre la faute, mais je garde et fais confiance à ma mémoire et mon ressenti. Je n’en veux pas au gynécologue qui est arrivé à la fin, qui est intervenu car le coeur du bébé ralentissait, qui d’après moi a fait ce qu’il fallait au point où on en était – j’étais à bout je n’avais plus une once d’énergie. Je l’ai remercié le soir, je l’ai revu 1 mois après et je n’ai jamais regretté ma démarche qui était symboliquement pour moi une espèce de réconciliation pour m’aider à avancer. Par contre, la raison pour laquelle d’après moi il est intervenu c’est que j’ai très mal été prise en charge à mon arrivée. Je ne voulais pas être allongée les jambes en l’air, on ne m’a pas écouté, j’ai perdu tout sentiment d’écoute et contrôle de mon corps, je n’étais que douleur, je me suis épuisée car on m’a fait pousser beaucoup trop tôt alors que je ne le sentais pas. C’est donc à la sage femme que j’en ai voulu, que j’en veux sûrement encore, au fait que mon instinct ait été bafoué et mon corps mis dans un carcan. Elle je lui ai dit au revoir merci quand elle est partie, mais sans plus, surtout par automatisme, et je n’ai jamais cherché à la revoir. Donc c’est tout le processus qui est à repenser. Si j’ai eu episiotomie et forceps (sans péridurale) et traumatisme et ensuite dépression c’est parce que il n’y a pas d’écoute du corps des femmes, à commencer par les sages femmes. Il y en a sûrement des supers mais beaucoup me semblent enfermées dans le système. Souvent je refais le film de cette nuit là dans ma tête et je me dis que tout aurait pu être très différent, si on m’avait laissé me mettre à 4 pattes comme mon corps me le dictait. Merci pour votre blog, votre démarche est une bouffée d’air.

    • Myriam says:

      Bonjour Alia,
      Je ne vais pas raconter encore mon histoire, la plupart des messages ayant pour auteur Myriam sont de moi. Je veux simplement vous dire que ce qui m’a profondément blessée c’est également de m’être fait obligée à la plus grande passivité lors de la naissance de mon ainée. J’ai eu le sentiment que plus rien ne m’appartenait, que je devais me taire, obéïr, subir pour mon bien…ce sentiment de servitude et soumission absolue d’ailleurs on le dit: “Prise en charge”. La société où je suis née, le Québec m’a blessée dans cette histoire, je suis partie aussi. Bientôt 3 ans, et une deuxième naissance il y a bientôt un an, fantasmique, j’ai encore de la colère.

      Si ça peut vous consoler, j’ai fait TOUT ce que je voulais, personne ne m’a dit quoi faire, je n’avais malheureusement pas confiance, j’étais sure de moi j’ai donné naissance avant l’arrivée de la Sage-femme, j’ai attrapée ma petite seule, et jamais je nz le tais pas, la personne qui sait mieux, c’est soi-même,et il a 2 acteurs obligatoires pour une naissance la mère et son bébé si aucune complication un intervenant compétent se contente d’observer…comme les vétérinaires en fait…

      Il faut une révolution

  20. chenebault says:

    bonjour, pour moi mon premier accouchement a plongé ma vie dans le handicap notamment lombaire. Il a été équivalent à un accident. Ce jour-là, tout a l’air de s’être trés bien passé, ma sage-femme m’a accouché à domicile, l’enfant est arrivé assez vite, en bonne santé et dans la joie. Cependant au fur et à mesure des jours, des mois et des années, j’attendais le jour où je pourrais marcher et m’asseoir sans douleurs… mon entourage a à peine vu une partie visible de mes douleurs, mon entourage et les médecins me disaient qu’il fallait me faire aider mais personne ne m’aidais réellement… et moi, j’attendais, j’étais aussi dans le deni, dans l’attente… 2ans pour remarcher sans douleurs, puis 4ans pour le deuxième accouchement… lors du premier accouchement, les contractions ont commencées 3 semaines avant terme suite à la torsion d’une cheville et ma chute enceinte dans la rue; après l’accouchement, j’ai eu des déchirures des disques intervertébraux, des abducteurs, du périnée et bascule du bassin puis lumbagos à répétition avec 3 blocages par terre et par la suite plusieurs années d’hernies discales et de sciatiques parfois avec décharges électriques…
    je cherche des témoignages de femmes ayant vécu cela; merci pour vos actions, mme delahaye !!

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