Femmes qui enfantent, femmes qu’on affame

Les sociétés patriarcales ont une constante, celle de priver les femmes de nourriture. De nombreuses croyances et coutumes visent à restreindre leur accès à une alimentation riche et de qualité. Certes, chaque culture invoque ses propres raisons, souvent religieuses, pseudo-scientifiques ou traditionnelles, pour justifier de telles pratiques, mais la finalité est la toujours même : affaiblir physiquement les femmes pour mieux les dominer. Afin d’optimiser leurs effets, ces limitations alimentaires sont encore renforcées au moment où les femmes ont le plus besoin d’apports nutritifs, par exemple pendant la puberté, la grossesse et l’allaitement. C’est ainsi que les magazines féminins destinées aux jeunes filles prônent à chaque nouveau numéro un régime aussi culpabilisant que miraculeux, que les traditions auvergnates n’accordent aux paysannes que les restes laissés par leur époux, ou que les futures mères de certaines tribus africaines se voient privées, au nom de superstitions, tantôt d’œufs tantôt de poisson. Les femmes enceintes sont bien sûr une cible toute désignée pour ces restrictions. Tout au long de leur grossesse, elles subissent une pression médicale constante pour freiner leur prise de poids et doivent se soumettre à une liste d’aliments qu’il est de bon ton d’éviter. Comme l’accouchement est le théâtre d’une domination masculine la plus extrême, il n’est pas surprenant que les médecins interdisent purement et simplement aux femmes de manger et de boire pendant qu’elles mettent leur enfant au monde. Examinons donc ce dernier point.

Le dogme du jeûne pendant le travail obstétrical a été introduit en 1946. Pendant la première moitié du XXème siècle et après avoir tiré les leçons des ratés du chloroforme, la recherche médicale a considérablement amélioré la technique de l’anesthésie générale. C’est dans cette lancée que le docteur Curtis Mendelson a observé que les aliments présents dans l’estomac d’un patient endormi pouvait remonter dans son œsophage et s’introduire dans ses poumons, causant asphyxie ou infection parfois fatales. Il n’en fallait pas plus pour que, du jour au lendemain, toutes les femmes se soient vues interdire de manger et de boire dès leurs premières contractions, au nom des risques qu’elles couraient s’il fallait les endormir en urgence pour pratiquer par exemple une césarienne. Il faut avouer qu’à partir du moment où les protocoles hospitaliers prévoyaient déjà d’attacher les femmes à la table d’accouchement dans la position la plus douloureuse et de mutiler systématiquement l’entrée de leur vagin à l’aide de ciseaux, le fait de les affamer et assoiffer pendant de nombreuses heures ne semblait pas soulever beaucoup de questionnement quant à la violence intrinsèque de cette pratique.

Pendant les sept décennies qui ont suivi, les techniques obstétricales se sont améliorées, les recours à l’anesthésie générale pendant l’accouchement ont dégringolé, les études démontrant le peu d’intérêt de ce jeûne se sont accumulées, mais l’interdiction de boire et de manger est restée.

Pour rappel, l’accouchement constitue un effort physique s’étendant sur de nombreuses heures durant lesquelles l’utérus se contracte de plus en plus fort et de plus en plus rapidement jusqu’à l’éjection du bébé. A l’instar d’une course de fond, ces poussées continues effectuées généralement dans un endroit chaud, incitent la parturiente couverte de sueur à boire encore plus que pendant ses activités habituelles. Quant à l’envie de se sustenter, elle est en général présente en début de travail, surtout s’il a commencé longtemps après le dernier repas, mais s’atténue lorsque la femme est emportée dans le tourbillon des sensations extrêmes. En revanche, lorsqu’elles bénéficient d’une péridurale, les parturientes gardent volontiers leur appétit jusqu’à la naissance de leur enfant. Dans ce contexte, priver les femmes de boisson et de nourriture pendant parfois une journée entière consiste à leur infliger une cruelle épreuve, ressentie pour certaines comme bien plus douloureuse que l’accouchement lui-même. A cela s’ajoute l’humiliation, rarement rencontrée dans la vie, de devoir supplier son entourage pour obtenir quelques gorgées d’eau et se les voir refuser avec autorité, paternalisme voire dédain.

Dès les années 80, les maternités de certains pays comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas se sont montrées beaucoup plus libérales quant à la possibilité pour les femmes de boire et manger, sans provoquer une quelconque différence de mortalité par rapport à celles des pays restrictifs. Il était en effet difficile, depuis les travaux de Mendelson, de trouver dans la littérature des preuves scientifiques démontrant les bénéfices d’affamer et assoiffer les femmes qui enfantent, surtout depuis la généralisation de la césarienne sous péridurale ou rachianesthésie, permettant de maintenir les futures mères conscientes pendant l’opération. Depuis 2010, la science est formelle en indiquant que boire et/ou manger ne présentent ni bénéfice, ni danger particulier tant pour les femmes à bas risques de complications que pour les nouveau-nés, et que le choix de s’alimenter devrait être laissé aux femmes.[1] Cela n’empêche pourtant pas un grand nombre de praticiens de continuer à invoquer cette interdiction érigée en précepte religieux.

Plus risible encore, les obstétriciens qui brillent rarement par leur logique, ne remarquent pas que cette interdiction est en contradiction flagrante avec leurs propres pratiques. C’est ainsi qu’ils parviennent sans sourciller à priver de nourriture toutes les parturientes, y compris et surtout celles qui sont sous péridurale, après leur avoir vanté l’intérêt de cette analgésie qui permet précisément d’éviter l’anesthésie générale. Dans la même veine, s’appuyant sur le constat que la digestion des femmes enceintes est ralentie au point que sa durée peut atteindre 48 heures, les anesthésistes considèrent systématiquement les femmes enceintes comme des personnes ayant l’estomac plein lorsqu’il s’agit d’endormir celles ayant mangé durant les 24 dernières heures. Malgré cela, les médecins n’ont aucun soucis à imposer le jeûne aux parturientes, tout en refusant qu’un accouchement se prolonge au-delà de 12 heures, trop pressés qu’ils sont d’accélérer la naissance au nom du dogme de l’ouverture du col de l’utérus d’un centimètre par heure et des délais arbitraires d’expulsion de l’ordre de 30 minutes. Qu’importent ces incohérences, les gynécologues adoptent avec empressement, gaité et allégresse toute mesure, si aberrante soit-elle, renforçant leur domination sur les femmes, mais émettent les pires réticences à se conformer aux recommandations scientifiques concédant à celles-ci une once d’autonomie et de liberté.

Ces dernières années, l’étau s’est peu à peu desserré sur les femmes qui refusent l’abstinence. Les praticiens dotés d’un peu de bon sens et certaines sages-femmes lassées des implorations de bouches desséchées ont adapté leurs protocoles pour autoriser les femmes à boire, voire même à manger. Ce relâchement ne s’est bien sûr opéré que sous strictes conditions. Pour les uns, les parturientes ne peuvent boire qu’un maximum de 400 millilitres d’eau toutes les heures. Pour d’autres, elles peuvent se désaltérer à l’aide de boissons claires comme le thé, mais se voient bannir l’accès aux boissons énergisantes. Un jus de fruit avec pulpe est tantôt toléré, tantôt pourfendu. Dans les cas où le café est accordé, le nuage de lait et le morceau de sucre peuvent déclencher les foudres du service. La présence de bulles dans le liquide fait l’objet d’âpres débats et déchire la profession tout entière. Parfois, le mécanisme d’autorisation se base sur les caractéristiques physiques de la future mère pour ne l’autoriser à boire qu’en fonction de son indice de masse corporelle ou du nombre réduit de kilos qu’elle a pris durant sa grossesse. Quant à l’éventuel accès à la nourriture, les arbitrages se font soit en faveur de bonbons à sucer, soit au profit d’un nombre limité de biscuits secs, étant entendu que les modalités des commandes de pizza ou des livraisons du traiteur chinois en salle d’accouchement sont rarement stipulées dans les règlements hospitaliers.

Alors qu’elles ne cherchent qu’à répondre à leurs besoins les plus élémentaires, les parturientes se voient toujours enfermées dans des règles rigides, arbitraires et sans fondement scientifique. Au nom de la conception misogyne voulant que les femmes soient par nature dangereuses pour elles-mêmes et leur enfant, une coercition plus forte que dans n’importe quelle institution pénitentiaire est mise en place afin de contenir leur anatomie débordante. Pour l’obstétrique, il ne fait aucun doute que de terribles périls s’abattraient sur les maternités, voire sur la société toute entière, si les femmes se voyaient accorder l’incommensurable liberté d’accéder à leur guise à un verre d’eau ou à une tablette de chocolat.

Que mes lectrices sur le point d’accoucher se rassurent, cette privation de boisson et de nourriture est la mesure à la fois la plus absurde mais aussi la plus simple à contourner. L’accouchement à domicile permet sans conteste un accès inconditionnel au réfrigérateur et au garde-manger. Les sages-femmes investies dans les maisons de naissance, gardiennes de la physiologie et rendant le pouvoir aux femmes, sont non seulement tolérantes à l’égard de l’alimentation pendant l’enfantement, mais vont jusqu’à prodiguer des conseils sur les breuvages et victuailles les mieux adaptés aux circonstances. Quant aux hôpitaux, l’organisation des services et la pression sur le personnel conduisent les parturientes à être souvent seules, si bien que les nombreuses heures durant lesquelles elles sont abandonnées à leur sort leur permettent de boire et manger selon leurs envies. Dès lors, si vous comptez accoucher dans une structure hospitalière, il est tout à fait superflu de demander une quelconque autorisation de manger et de boire. Il vous suffit d’emporter avec vous un sac de provisions et d’appliquer dans la salle d’accouchement le slogan féministe « ne me libère pas, je m’en charge ».

 

Sources:

Cécile Daumas, Fabrice Drouzy, Françoise-Marie Santucci, « Pour en finir avec quelques préjugés », Libération, 7 avril 2007.

N. Devos, B. Dureuil, « Le syndrome d’inhalation », Société française d’Anesthésie et de réanimation, Conférences d’actualisation 2000, p. 127-139.

Valentina Faitot, Hawa Keïta-Meyer, « Apports liquidiens et alimentaires pendant le travail », MAPAR, Obstétrique, 2008, pp. 391-400.

A. Gaucher, « Anesthésie locorégionale pour césarienne d’urgence », Les Journées Lilloises d’Anesthésie Réanimation et de Médecine d’Urgence. 

Françoise Héritier, « Les femmes sont physiquement trop faibles… », Libération, 10 avril 2007.

Bérénice Kozlowski, « L’hydratation orale pendant le travail d’accouchement. État des lieux des pratiques des sages-femmes dans les maternités d’Auvergne », La Revue Sage-Femme, février 2012, pp. 9-15.

M.C. LATHAM, « Nutrition humaine en Afrique tropicale, Manuel pour le personnel de santé
traitant particulièrement des problèmes de santé publique en Afrique orientale », Chapitre «  Aspects sociaux et culturels de l’alimentation », FAO, 1979.

Curtis Mendelson, « The aspiration of stomach contents into the lungs during obstetric anesthesia», American Journal of Obstetric and Gynecology 1946; 52: 191205.

M. Rège-Walther, G. Théry, L. Thierrin, I. Peytremann-Bridevaux, « Faut-il autoriser les femmes à boire ou à manger pendant l’accouchement ? », revue Cochrane pour le praticien, revue médicale suisse, 20 octobre 2010.

M. Singata, J. Tranmer, GML. Gyte, « Restricting oral fluid and food intake during labour », Cochrane Database of Systematic Reviews, 2010, issue 1.

Association Césarine,  « Les types d’anesthésie pour une césarienne ».


[1] M. Rège-Walther, G. Théry, L. Thierrin, I. Peytremann-Bridevaux, « Faut-il autoriser les femmes à boire ou à manger pendant l’accouchement ? », revue Cochrane pour le praticien, revue médicale suisse, 20 octobre 2010.

 

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21 Responses to Femmes qui enfantent, femmes qu’on affame

  1. Flo says:

    Comme d’habitude, très bien documenté. ça parait encore plus absurde quand on connait tous ces éléments !

  2. Kwak says:

    Je rajoute même que dans son ouvrage Ina May’s Guide to Childbirth (p. 221), la sage-femme Ina May Gaskin note d’après son expérience sur le terrain que prendre une collation en toute fin de travail permet souvent à la femme de trouver une nouvelle force pour l’expulsion. Et que si jamais la nourriture la fait vomir, ce n’est pas grave, car cela aide la dilatation du col de l’utérus (selon la “loi du Sphincter”).

    Lisant avec intérêt ton blog depuis un moment, je me demandais si tu avais entendu parler de “The Skeptical OB”, un blog tenu par le Dr Amy Tuteur et dont le but est de partir en croisade contre les femmes et les sages-femmes qui pratiquent l’AAD. Elle défend bec et ongles le déclenchement (qui selon elle a permis de faire baisser le nombre de morts-nés), ainsi que la césarienne (qui aurait un taux de morbidité plus important car pratiqué à la base sur des cas pathologiques, mais serait le moyen le plus sûr d’accoucher, cf. son article “Let’s review: Twelve things you shouldn’t say to Dr. Amy … unless you want to appear very foolish”). Pour elle, la violence obstétricale, ce sont les sages-femmes qui en voulant respecter la physiologie, font mourir les bébés (je n’exagère pas, c’est vraiment ce qu’elle dit). Un complot contre les obstétriciens, en somme (cf. l’article “We need to talk about obstetric violence: midwives are letting babies die”). Ca hérisse le poil, mais ça pourrait te donner du grain à moudre.

    Au plaisir de te lire !

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Et en plus, tant qu’à vomir, c’est toujours moins désagréable quand on a l’estomac plein que l’estomac vide. L’essentiel est de toutes façons que la femme puisse boire et/ou manger ce qu’elle veut et quand elle veut. Ecouter son corps et s’y adapter au mieux est la façon la plus simple d’accoucher.

      Je ne connaissais pas ce blog. Je viens de jeter un oeil. Je sens que ça va être une intarissable source d’inspiration. Ce n’est pas mon habitude de critiquer les femmes, mais là, franchement, cette obstétricienne est un peu hystérique quand même, non ? 🙂

      • Kwak says:

        Oui, c’est plutôt “The Hysterical OB”… Elle a fait un bingo sur l’AAD, mais on pourrait faire exactement la même chose avec les propos tenus par les obstétriciens pendant l’accouchement (chiche ?)

  3. Lulu says:

    Merci à nouveau Marie pour ce très beau texte, très logique aussi. Je m’empresse de partager comme d’habitude.

  4. Blandine says:

    bonjour,

    Un de mes souvenirs les plus terribles de mon 1er accouchement fut la sensation de soif intense, atroce que j’ai endurée. Je suis restée sans boire autour de 20h, dont les 3/4 dans une atmosphère surchauffée alors que mon corps fournissait un effort intense. Je n’imaginais pas que la soif puisse être une telle souffrance … bien distincte de la souffrance des contractions par les reins subies sous ocyto sur le dos, chacune de ces souffrances résonnant l’une de l’autre.

    Laisser des femmes en jeune hydrique est stupide et dangereux. Et ça n’est pas leur perf à la c** qui y change quoique ce soit. De plus, cette approche n’est pas sans créer des complications et des problèmes.

    Mais bon … l’obstétrique française … et ses incohérences dont les bébés et les femmes pâtissent …

  5. Ailili says:

    Une fois de plus, merci pour cet article. J’apprécie toujours votre apports des explications historiques des actes pratiqués, et vos démonstration de leur obsolescence / inutilité aujourd’hui.

    Je suis actuellement enceinte de mon premier enfant. Je suis quelqu’un de timide, qui n’a osé remettre en cause l’avis des médecins qu’après un acte “médicale” intrusif, sans demande de consentement, et dont je sens bien que je ne suis pas tout à fait remise psychologiquement encore aujourd’hui.

    C’est grâce à des blogs comme le votre que j’en apprends toujours plus sur les pratiques néfastes et inutiles de l’accouchement, que j’aurais probablement subies le jour J si je n’avais pas lu vos articles, entre autre.

    Il y a peut, j’ai enfin osé dire à ma sage-femme, avec arguments à l’appui, que je ne voulais plus de touchers vaginaux. Elle l’a bien pris et m’a d’ailleurs avoué qu’elle le faisait plutôt par habitude.

    Quant au fait de boire ou de manger… je comptais le mettre dans mon projet de naissance, mais au vu de votre conclusion on ne peut plus logique, je crois effectivement que je vais éviter d’attirer l’attention du personnel médical dessus, et apporter de quoi faire bien tranquillement.

    Encore une fois, merci pour vos articles, toujours intéressants, documentés et argumentés.

  6. Isabelle says:

    En effet, je me pourvoie de ces petites choses adorées et/ou dont j’ia envie pour la naissance (cela va de cacahuètes aux bonbons,au mac do bien gras et caloique mais surtout de boisson petillante noire…) ;lors de la naissance de mon dernier bébé,j’ia dit à la SF, j’ia faim, dans combien de temsp revenez vous nosu voir?
    -d’ici 1h;vous avez le temps (avec un clin d’oeil)
    Merci à elle d’être juste une femme sage (et elle le fut tout au long de cette naissance allan jusqu’à se placer à coté de moi sans rien faire et laissant le papa accueillir bébé)

  7. dalva says:

    Je confirme, restée plus de 24 heures sans manger. Installée dans ma chambre en pleine nuit, il n’y avait rien à manger, une infirmière a eu pitié de moi et m’a donné un yaourt. Un peu léger après une telle épreuve. Qu’ils nous affament, soit, mais en plus rien n’est prévu pour nourrir les jeunes mamans.

  8. Marie-Estelle says:

    J’ai accouché en maternité classique. J’avais en effet prévu quelques victuailles planquées dans le sac destiné à me suivre en salle d’accouchement, mais c’était sans compter sur mon homme, désoeuvré, qui a fait du zèle en vidant tous mes sacs dans l’armoire de ma chambre… alors mesdames, mettez votre accompagnant dans la confidence! Ceci dit, je n’avais pas faim…
    Par contre, une fois le bébé né, c’est par coïncidence horaire que le dîner m’a été servi dès mon retour en chambre. Je ne suis pas sûre que j’aurais pu l’avoir en pleine nuit…

    • Zab says:

      Il faut prévenir son homme surtout pour éviter qu’il ne se range du côté de l’équipe médicale en pensant bien faire… Je me souviens de la terrible soif (les maternités sont souvent trop chauffées) et de la sage-femme qui disait à mon homme “vous pouvez lui brumiser un peu d’eau dans la bouche si elle a vraiment très soif”.
      Voilà une chose que je ne suis pas prête de leur pardonner, qu’ils aient utilisé mon homme pour me maltraiter (en m’empêchant de boire entre autres seulement, malheureusement…)

  9. Céline says:

    Vouloir affamer les femmes qui accouchent est d’autant plus aberrant que le stress causé par la faim provoque la libération d’adrénaline, une hormone qui ralentit le travail !
    Mais qu’importe après tout, on pourra toujours rajouter une bonne dose d’ocytocine de synthèse …

  10. riri says:

    bonjour,
    Que vous dire sinon partager vos propos aussi durs soient ils par moments. Mais aussi montrer que des alternatives existent en France. Depuis plus de 10 ans une équipe obstétricale et anesthésique a admis les principes énoncés par L’OMS en 1997.
    Boissons, repas, déambulation, avec ou sans péridurale, limitation du syntocinon ainsi que de nombreux gestes souvent inutiles tels les épisiotomies.
    Je suis fier d’exercer dans cette structure et reste a disposition pour des échanges fructueux.

  11. Dotchka says:

    Bravo pour ce billet, pour ce blog. Aux femmes de se libérer du joug médical et paternaliste.

    Dans mon parcours, j’ai eu beaucoup de déconvenues et problèmes avec le corps medical. Parmi mon vécu de parturiente, il y a celle de la nourriture et de la culpabilisation.

    Pour ma première grossesse, la sage-femme m’a presque agressivement accusé de me goinfrer suite à une prise de poids de 5 kilos au 5ème mois. J’ai dû me justifier et lui décrire par le menu, le repas que je venais de prendre, à savoir 2 poires bien juteuses. Des cris presque, un ton accusateur sur mon inconséquence à manger trop de sucre. Je dois préciser que la grossesse est une période pendant laquelle instinctivement je mange moins et mieux. Au final, une complication de la grossesse dû à un excès de liquide (d’où le poids) !!! Hospitalisation et accouchement prématuré pour mon aîné. Je ne m’étais pas goinfrée.

    Pour ma seconde grossesse, j’ai tourné le dos aux injonctions du corp médical. Quand l’un me disait “mais vous vous rendez compte de ce que vous faites à votre bebe ?”, je les rassurais. Aux conseils en tout genre, jamais basés sur des sources médicales hein, je disais oui-oui, et faisais comme je voulais. Mais, ma visite avec l’anesthésiste au 7 eme mois m’a vraiment déstabilisé. Je dois dire que je suis en surpoids depuis l’arrêt du tabac et ma premiere grossesse abrégée. Cet homme assez maigre a passé 15 minutes à me harceler sur mon poids, me traitant d’obèse à plusieurs reprises. J’ai d’abord cru à de l’humour medical pour mettre à l’aise puis à de la maladresse. Mais l’insistance dans le propos d’un homme érigé en commandeur des parturientes m’ont mis mal à l’aise. Il est évident qu’il cherchait à me déstabiliser, j’ai eu beau essayer, l’humour, genre dans quelques semaines mon obésité devrait disparaître ; le détournement de conversation, sinon quels sont les risques de la péridurale ; le retournement avec c’est les médecins les moins bien placés pour conseiller des regles d’hygiène de vie avec des semaines à 80 heures et un tabagisme plus élevé que la moyenne ; enfin, j’ai voulu couper court en lui rappelant que sa spécialité etait l’anesthésie et non pas nutritionniste. Rien n’y a fait, il lâchait pas, prenant un malin plaisir à me lancer des injonctions au régime, accompagnées de paroles blessantes. Je ne me suis pas démontée, lui est rétorqué que je n’appréciais pas ces remarques, que je lui demandais d’arrêter et de se mêler de ses affaires, que j’étais seule à disposer de mon corps, que si je m’aimais “obèse”, je resterais “obèse”. Mais il a continué !!! Alors, j’ai laissé tomber surtout qu’une fois en salle de naissance, j’aurais été à sa merci. J’ai fait l’idiote et j’ai dit oui-oui. Je suis sortie de ce rendez-vous en colère et non informée sur les risques encourus avec la péridurale. Heureusement pour moi, je n’ai pas eu à faire à lui le jour J. Et pourtant, j’étais dans une maternité ami des bébés, orientée vers un accouchement physiologique et respectueux de la mere.

    • Marie-Hélène Lahaye says:

      Je suis très interpelée par le nombre de témoignages de femmes enceintes évoquant le traumatisme de la rencontre avec l’anesthésiste au 7ème mois.

      Déjà, il faut savoir que cette rencontre n’est obligatoire qu’en France. En Belgique, je n’ai jamais croisé d’anesthésiste.

      Ensuite, je suis toujours frappée de voir le décalage entre les propos de l’anesthésiste et la connaissance élémentaire du processus d’accouchement. Beaucoup de témoignages évoquent une pression maximale de leur part pour prendre la péridurale, en insistant sur le coté à ce point horrible et douloureux de l’accouchement, comme si c’était l’événement le plus dramatique de la vie d’une femme. Beaucoup de femmes qui allaient très bien jusque ce rendez-vous en sont sorties traumatisées. Il y a vraiment un problème à ce niveau-là.

      J’ai aussi eu l’occasion de discuter longuement avec un anesthésiste. Ce qui m’a frappée, c’est qu’il ne connaissait pas les effets de l’anesthésie sur l’accouchement. Il était persuadé qu’elle favorisait systématiquement l’accouchement, en se référent aux rares cas où le col reste bloqué sous l’effet de la peur et de la souffrance, précisément le seul cas où la péridurale prend réellement tout son sens. Mais il ignorait que la péridurale, en engourdissant toute la zone du bassin, ralentissait l’accouchement et augmentait les dystocies et les extractions instrumentales. Quand je lui ai donné toutes ces explications, il a conclu par “c’est vrai qu’en tant qu’anesthésiste, j’arrive durant le travail, puis je passe à autre chose et je n’ai jamais le débriefing de la façon dont l’accouchement s’est ensuite produit”. Bref, un dysfonctionnement comme il y en a tant.

  12. Maëlle says:

    Cette idée de ne pas manger pendant de longues heures d’efforts m’inquiétant, j’ai posé la question. Plusieurs fois. On m’a répondu à chaque fois que je n’aurais pas faim. J’ai eu fort soif (malgré la perf), le brumisateur étant plutôt une gène qu’autre chose, et j’ai eu faim. Un peu pendant le travail. Beaucoup ensuite, puisque le petit déj’ promis à 8h30 est finalement arrivé à 10h.
    La seconde fois j’ai effectivement profité du calme de la salle de travail pour manger et boire comme j’en avais envie (boire plusieurs fois et manger peu).

    Merci de le dire: on peut avoir faim en accouchant.

  13. erulelya says:

    Merci pour toute cet article extrêmement bien documenté (comme tout le reste du blog d’ailleurs). Dans ma maternité on réprimande les femmes qui n’ont pas bien mangé “enfin madame, l’accouchement est un immense effort, mangez, buvez, comment vous voulez y arriver sinon ?”

    Donc on mange et on boit ce qu’on veut, je me suis même fait livrer un pizza, et juste après la naissance, après que bébé ai tété de tout son saoul, on nous sert un plateau au choix sucré ou salé, bien consistant. Ensuite seulement on nous emmène en chambre.

    Je suis toujours aussi sur le Q quand je lis ce genre d’atrocités, ma mère a accouché comme ça, 25h sans boire ni manger et attachée à son lit…

  14. mlle-cassis says:

    J’ai accouché il y a 3 mois, en Suisse. Ayant été admise une première fois aux urgences obstétricales quelques heures avant le début du “vrai” travail avec une bonne infection urinaire et un globe vésical d’un litre impliquant la pose d’une sonde, on m’a plutôt sérieusement encouragée à boire pendant tout le travail – pour faire partir l’infection.
    Comme j’avais vomi tout ce que j’avais mangé les 48h précédentes, je n’ai pas trop insisté pour manger. Je n’y ai même pas pensé une seule seconde, même après la pose de la péridurale (j’ai dormi, plutôt). Du coup, j’ai gardé mon (énorme) stock de bouffe pour les fringales de milieu de nuit des jours suivants. <3

  15. gwen says:

    Je confirme. Pour ma première fille, partis de la maison en pleine nuit avec une perte des eaux et sans contractions, nous n’avions pas réalisé qu’il était 5h30, et n’avons pas déjeuné. En chambre et avec une voisine qui voyait arriver son plateau de midi, j’ai demandé à manger. On m’a dit qu’il fallait d’abord examiner mon col, au cas où l’accouchement soit pour bientôt. Suite à l’examen du col, on m’a emmené en salle de pré-travail, et mis un coton pour déclenchement. Je n’avais rien mangé depuis la veille au soir. Ensuite, mon bébé ne descendant pas, plusieurs souffrance faetales, je n’ai accouché qu’à 20h30 (avec forceps et une belle épisio), sans avoir rien mangé. Mon mari est sorti deux fois pour s’acheter quelque chose, mais moi, je n’avais le droit à rien malgré mes demandes. Ensuite, laissée 3 heures avec mon bébé en salle, et lorsque je suis enfin revenue en chambre, affamée, on a souligné que par gentillesse, on allait essayer de me trouver quelque chose : un yaourt, une compote et un bout de pain. Epuisée, j’ai demandé à ce qu’on me prenne le bébé quelques heures dans la nuit: refusé, car les bébés après l’accouchement sont soit disant épuisés, et dorment. Evidemment, mon bébé à hurlé toute la nuit, et je m’en suis donc occupée seule (car mon mari ne pouvait pas rester) sans dormir, avec un accouchement dans les dents, une chatte explosée, pas de sommeil, et un yaourt, une compote, un bout de pain, en 36h….. Tout le monde a été bien gentil, mais je comprend maintenant que ça aurait pu être autrement. J’ai un souvenir froid et traumatisé de ce moment, et j’ai mis du temps à devenir mère ensuite, on se demande pourquoi.
    J’ai eu un deuxième enfant dans une maternité qui protège les mères, et les enfants. J’ai eu le droit de manger, on m’a aidé, et ce deuxième accouchement dans la douleur, sans péridurale par choix, me reste en mémoire comme un émerveillement.

  16. addi says:

    bon , moi on m’a laissé boire 1 verre d’eau par heure, mais j’ai pas eu le droit de manger. J’ai acheté un gros sandwich avant d’entrer en salle de naissance (jamais vu de salle de travail, on me faisait juste marcher et revenir) , j’avais prévu de la bouffe pour après et j’ai eu un super repas après l’accouchement en pleine nuit . Pas d’épisio , une super équipe et j’ai béni l’anesthésiste qui m’a posé la péri , j’étais bien triste pour toutes celles qui accouchent dans la douleur de par le monde, je n’avais jamais eu aussi mal de ma vie pendant les contractions. Je ne sais pas si j’ai eu de la chance , mais j’avoue que tous ces discours apocalyptiques, dont ceux que je lis ici m’avaient bien terrorisée pendant toute ma grossesse . Maintenant que je sais ce que c’est d’accoucher , je prie juste pour que les discours pro accouchement naturel et faisant croire aux femmes qu’elles se libéreront en morphlant (sans parler de ceux qui laissent croire qu’on peut accoucher sans douleur en apprenant à gérer son stress) ne feront pas sauter la prise en charge de la péridurale par la sécu.

    • Maryline says:

      Totalement d’accord. Comme je le dis toujours, il faut arrêter de croire qu’accoucher naturellement, c’est comme manger des patates bio, indolore…
      Pour ma part, accouchement très très long, j’avais de l’eau dans ma chambre, mais pas de nourriture, et en salle de travail (sous péri), interdiction de boire.
      Résultat de 2h du matin jusqu’à 4h le lendemain (retour en chambre), j’avais juste bu un peu d’eau, jamais mangé. Et on ne m’a pas proposé d’eau après l’accouchement (où je suis quasi tombée dans les pommes), ni de nourriture au retour en chambre non plus. Sachant que tout avait débuté à 22h l’avant-veille. Oui, sacré effort. On n’a jamais voulu non plus me soulager en prenant mon bébé un peu la nuit pour que je dorme. Et je suis traumatisée de tout ce que j’ai pu vivre. Bon courage les filles

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