Cet été, France Culture a consacré neuf heures d’émission au féminisme d’aujourd’hui, répartie en cinq épisodes quotidiens, intitulée « La Grande Traversée : Women’s Power, les nouveaux féminismes ». J’ai eu le plaisir d’intervenir dans le deuxième volet « nos corps nos choix » consacré à l’IVG et à la maternité.
La première partie de ce volet aborde la question de l’IVG, ce droit encore très fragile, régulièrement remis en question par des mouvements réactionnaires cherchant à ôter aux femmes la libre disposition de leur propre corps et le choix de mettre au monde un enfant ou non.
Un passage intéressant dans l’émission est l’analyse du positionnement médical face à l’IVG. On y apprend que des mouvements historiques tels que le MLAC ont continué de pratiquer des avortements en dehors du contexte médical même après l’adoption de la loi Veil en 1975, avec souvent de meilleurs résultats que dans les hôpitaux. Des femmes ont alors avoué aux militantes de ce mouvement qu’elles ont mieux vécu leur avortement que leur accouchement, grâce à l’environnement de bienveillance dans lequel ils étaient effectués. C’est alors que certaines antennes locales du MLAC se sont mises à accompagner des accouchements. Cette pratique des naissances bienveillantes est tombée dans l’oubli du mouvement féministe pendant 30 ans. Aujourd’hui, le film « Regarde elle a les yeux grands ouverts » (1980) est exhumé principalement pour sa séquence montrant un accouchement qui a eu lieu dans la communauté du MLAC près d’Aix-en-Provence.
Un autre aspect de l’IVG est la tendance actuelle des médecins de se désengager de cet acte. Non seulement bon nombre d’entre eux refusent de le pratiquer, transformant la demande d’avortement en un parcours du combattant pour les femmes, mais en plus, ils sont de plus en plus nombreux à prôner l’IVG médicamenteuse. Cette dernière est particulièrement douloureuse, et renvoie les femmes à la solitude en les obligeant à vivre leur avortement seules à la maison. Ce n’est qu’en cas d’hémorragie et d’un transfert à l’hôpital que les médecins prennent en charge les femmes. Ils n’interviennent dès lors dans l’avortement qu’après l’expulsion de l’embryon, exactement comme ils le faisaient il y a 40 ans lorsque l’IVG était interdite.
La deuxième partie du documentaire est consacrée à la maternité, et en particulier aux violences obstétricales pendant l’accouchement. Une longue séquence porte sur les prises de position d’un planning familial sur ce sujet. J’interviens ensuite dans le débat pour évoquer ces violences d’un point de vue féministe et aborder les maltraitances gynécologiques en général.
L’émission se termine sur le sujet de la gestation pour autrui.
Le fait d’enchaîner dans une même émission féministe la question de l’IVG et celle de la maternité, en les inscrivant dans un continuum des droits des femmes sur leur propre corps, est un tournant radical dans la pensée féministe.
En effet, durant tout le XXème siècle, les féministes qui se sont battues, avec raison, pour le droit à la contraception et à l’avortement, ont eu tendance à voir la maternité d’un mauvais œil, voire à considérer les mères comme des traîtresses à la cause des femmes.
Simone de Beauvoir n’a pas accouché. Si elle évoque (à peine) l’accouchement dans le Deuxième Sexe, c’est pour l’inscrire dans le contexte médical. Elisabeth Badinter a, par la suite, fustigé la maternité en s’attaquant à l’allaitement et, de façon presque risible, aux couches lavables. Quant aux militantes féministes des années 1990 et du début des années 2000 (dont je faisais partie), elles œuvraient avant tout pour déconstruire le genre en s’intéressant à des situations à la marge telles que le lesbianisme, la transsexualité, l’intersexualité. Elles ont démontré, en s’appuyant sur la science, que la différence entre les hommes et les femmes, qu’on croyait jusque-là immuable, était avant tout une construction culturelle. Cette déconstruction du genre laissait peu de place aux réflexions sur la maternité, et en particulier sur l’accouchement, parce qu’elles mettaient en exergue une différence physiologique entre les femmes et les hommes.
Lorsque j’ai lancé mon blog il y a trois ans, j’avais comme objectif premier de poser la maltraitance des femmes pendant l’accouchement comme une question féministe, en analysant tous les gestes médicaux imposés aux futures mères à l’aune de la domination masculine et de la société patriarcale. J’ai fait face à une levée de boucliers de féministes affirmant que la mortalité maternelle a baissé depuis que les femmes ont accès à l’hôpital pour accoucher (ce qui est faux), et défendant la péridurale comme une avancée féministe (ce qui est également faux).
Il y a deux ans, on m’invitait uniquement dans les milieux de la naissance respectée. Aujourd’hui, on m’invite aussi dans les colloques et émissions féministes. Un basculement a eu lieu.
L’émergence d’une nouvelle génération de féministes qui porte le combat de la lutte contre les violences obstétricales est une première victoire. Il s’agit d’un pas décisif pour permettre à toutes les femmes d’être enfin respectées lorsqu’elles mettent leur enfant au monde.
L’émission de France Culture est disponible en podcast : “Nos corps, nos choix »
Pour aller plus loin :
La série complète de la Grande Traversée « Women’s power les nouveaux féminismes »
L’interview de la documentariste de l’émission Charlotte Bienaimé : « Women’s Power: les nouveaux féminismes, à l’honneur sur France Culture »
Le dur labeur porte fruit, encore une fois merci pour ton travail honorable. Pour ma part, je ne me suis jamais considérée féministe, je trouvais que l’égalité était atteinte et que les femmes qui étaient toujours “soumises” c’etait parce qu’elles se laisssaient faire (ce qui n’est pas entièrement faux). Je pensais tout cela puisque j’ai eu la chance de grandir dans un milieu relativement égalitaire avec des parents féministes en quelque sorte, et car j’ai toujours eu de la facilité à m’exprimer, à prendre ma place alors je n’ai jamais eu besoin de me défendre parce que je fais partie de la moitié de la planète née femelle. Mais maintenant je réalise comment l’ont te traite lorsque tu deviens mère, et combien la souffrance fait partie intégrante pour les gens de la condition féminine. Cette situation que l’on m’a imposée parce que je suis une femme et par soucis de productivité je ne l’accepte pas. Parce que je suis habituée d’avoir une dignité, d’avoir le plein contrôle de mon intégrité et puisque que j’ai toujours été une personne à part entière, j’accepte mal d’être traitée comme une demie personne, comme une femme. Cette journée du 12 au 13 juin 2015 je suis simplement devenue une femme, voilà ce qud j’ai vécu… j’ai compris que l’on peut contre ton gré te déposséder de ce qui t’est le plus précieux après la vie, ton corps, ta liberté, ton intégrité psychologique malgré que tu sois une personne qui en temps normal se défend. Non je ne suis pas une victime voilà pourquoi je me bats. Tu m’as ouvert les yeux sur tout cela, merci infiniment, tu es pour moi un modèle féminin, quelqu’un que je ne connais que virtuellement, mais qui m’a fait un bien réel. Je souhaite qu’enfin les femmes arrêtent de se laisser faire et construisent une solidarite entre elles.
Heureusement la maternité devient un enjeu féministe puisqu’elle concerne une majorité de femmes et sans nous l’humanité n’aurait plus d’avenir….
Merci Myriam pour ton témoignage.
En général, on devient féministe en étant confrontée à une discrimination ou une violence sexiste. Ensuite, il devient impossible de ne plus voir la domination masculine.
Pourriez-vous m’éclairer sur ce passage ? : ” J’ai fait face à une levée de boucliers de féministes affirmant que la mortalité maternelle a baissé depuis que les femmes ont accès à l’hôpital pour accoucher (ce qui est faux)”.
À quels chiffres faites vous référence ?
Merci.
Vous voulez des chiffres sur le prétendu lien entre l’accouchement à l’hôpital et la baisse de mortalité maternelle ?
Voici deux billets qui le démontent, avec les sources en fin d’article:
http://marieaccouchela.blog.lemonde.fr/2014/09/09/il-y-a-deux-siecles-je-serais-morte-en-couches-vraiment/
http://marieaccouchela.blog.lemonde.fr/2014/09/23/si-je-navais-pas-accouche-a-lhopital-je-serais-morte-et-mon-bebe-aussi-ah-bon/
Merci pour cette article.J’ai eu la chance de ne jamais avoir a faire un IVG mais les récits des femmes sur se sujet font peur. Le manque de respect pour le corps et le choix des femmes. l’accompagnement bienveillant n’est pas encore au rendez vous.
En se qui concerne l’accouchement je me suis sentie beaucoup plus “féministe” en accouchant à la maison que à la maternité. J’étais maître de mon corps et de mes sensations , j’ai éprouver une grand liberté. Et je souhaite que les pratiques obstétrical évoluent pour intégrée une plus grand bienveillance lors de la naissance.
Merci pour ce témoignage, Capucine.
Bonjour, je n’arrive pas à faire de tag sur le message, je le colle ici 🙂 : https://www.facebook.com/valerie.maestretron/posts/10154796355356412
Je viens de découvrir ce blog et je ne suis pas grand mère, mais j’ai l’âge, cependant mes accohchements sont le plus mauvais souvenir de ma vie ; j’ai eu deux fils, et c’était dans les années 80 juste avant la panique du sida. Pour le premier j’avais choisi un medecin réputé qui soignait les femmes qui ne tombaient pas enceinte, mais j’avais fini par y arriver donc je lui faisais confiance, j’ai accouché à l’hopital de Nice, j’avais bossé seule l’accouchement sans douleurs, et je suis arrivée à une douleur toutes les cinq minutes, à midi, j’ai accouché dans la chaleur à 19 h 30, je souffrais depuis 7 h du matin. J’ai eu les cuilléres- il parait que ce n’a rien avoir avec les fers – et bien j’ai comparé ça à un écartélement, depuis toutes mes souffrances sont ramenée à ça, c’est mon metre étalon de la douleur, le dentiste ne me fait plus rien. Je pleure quand je vois un début d’accouchement à la télé, encore maintenant -mon fils à 35 ans. Ensuite ils m’ont endormi parce que le placenta ne sortait pas et j’ai ensuite eu mal au ventre des années au dessous du nombril : on m’avait mis le bras dans l’utérus parce que ça ne se décollait pas ! je ne l’ai su que bien longtemps après : j’hallucine encore ! bien sur j’avais été recousu. A côté c’est de la rigolade. Je vous passe que durant le travail on m’avait forcé à rester allonger avec une ceinture qui mesurait les battements cardiaques, en m’empêchant de marche ce qui fait que ça décuple la douleur. Mon mari est resté avec moi, du coup la sage femme s’est barrée. Elle ne m’a jamais donné aucun conseil. Donc comme je voulais deux enfants, j’ai voulu remettre ça (mari affolé) et j’ai été voir un docteur qui pratiquait l’accouchement avec piqure anésthésiante péridurale, sauf que quand je suis arrivée la nuit au bout d’un heure j’étais assez dilatée et qu’on m’a fait descendre. Bien, là il n’était plus question d’anesthésie à trois h du matin, et la toubib m’a fait une épisio pendant que la sage femme tournait le dos, parce que celle-ci ne voulait pas, sous le nez de mon mari qui m’a tout raconté, et qu’elle s’était couché sur moi en appuyant de toutes ses forces pour “m’aider” à pousser : j’ai cru être au moyen âge ! finalement je m’en suis sortie avec des points. Dans le second cas j’avais dit à la docteuresse que j’avais trop d’hémorroïdes et qu’il fallait me ménager ! la premiére fois je ne pouvais déjà plus marcher, la seconde ce fut pire, j’avais des boules bleues, j’étais tellement fatiguée les deux fois que c’est mon mari qui durant un mois s’est occupé des bébés. Mais comme les enfants vont bien, on ne dit rien ! c’est ça l’accouchement, heureusement je n’ai pas de fille ! merci de me permettre de pouvoir témoigner, ça fait des années que j’ai la rage, je suis d’accord pour les contrôles des gynécos, ce sont des mandarins. Je vous passe les mamographies qui sont faites pour nous sauver. Il ne faut pas dire que c’était dans le temps.
Bonjour,
Mon accouchement, je l’ai décrit en long, en large et en travers auprès de d’autres mamans, pour comparer.
Comme je ne présentais pas l’aspect idyllique de l’évènement, plusieurs ont parlé de leur vécu, qui pour certains m’ont fait me dire : de quoi te plains-tu !
Une phrase m’est venue à l’esprit : “Tu enfanteras dans la douleur !” Quelle résonnance elle a à présent !
Je suis maman d’un petit gars de 4 ans. C’est ma plus belle réussite dans ma vie, j’en suis fière, mais je ne me sens pas en capacité physique ni psychologique de participer à la création d’un second enfant.
Globalement, j’ai un bon souvenir de ma grossesse. Je découvrais un autre aspect de mon corps et un changement psychique, j’observais, écoutais. C’était nouveau, parfois même rigolo (manger plus que mon mari, défis relevé !).
J’ai suivi des séances de préparation à l’accouchement auprès d’une sage-femme très douce, poussant à écouter son corps, à se faire confiance. Elles nous avait averti qu’il ne fallait pas hésiter à exposer nos souhaits le jour de l’accouchement, que si l’on ne voulait pas de péridurale c’était notre droit, pareil pour la position dans laquelle on se sentait le plus à l’aise pour travailler…
Le jour J, un peu de stress, d’inquiétude. Prise en charge par une jeune sage-femme souriante assise sur le fameux ballon avec lequel je faisais des exercice à la maison (cool çà ressemble à chez la sage-femme). Elle me laisse déambulée dans les couloirs, j’étais mieux debout quitte à m’appuyer contre un mur à l’arrivée de contraction. On déconnait avec mon mari, genre t’as vu comment je marche ! (100°/° canard)
Changement de service, nouvelle sage-femme, une personne d’expérience. Elle examine le col, ne le trouve pas très dilaté depuis le temps que je me balade. Décide d’examiné çà de plus près et perce la poche des eaux. (Son côté vieille peau s’était révélée.)
Douleur. Je lui dis que j’ai moins mal quand je suis debout. Elle m’annonce que je ne peux plus l’être car la poche est percée et que dans ce cas le risque est trop important que le bébé se retrouve avec le cordon autour du cou.
Condamnée à rester allongée. Elle me dit que si j’ai mal on va poser la péridurale, ce à quoi je réponds que je ne la souhaite pas. Elle me fait comprendre par son regard, son attitude puis verbalement que c’est un mauvais choix, que je vais douiller. (Dans ma tête c’était : Toi tu m’as déjà fait mal et tu m’as empêché de rester dans une position qui me soulageait) Elle est sortie et n’ai revenue que bien longtemps plus tard, nous abandonnant avec mon mari (c’est ainsi que je l’ai ressenti). Quand elle est revenue je tremblais des jambes à cause des douleurs et de la fatigue.
Je me suis résignée à la péridurale. Elle a souri et est allée chercher l’anesthésiste. Une fois branchée de partout, elle est partie, sans recommandations, encouragements, conseils, rien. A son retour, j’étais restée trop longtemps sur le même côté l’anesthésiant c’était stocké dans mon côté gauche, je ne sentais plus rien ( un an après l’accouchement je pouvais me pincer la fesse gauche sans rien sentir). Toutes les contractions avaient disparu, je ne vivais plus mon accouchement, je le subissais. Nouvelle auscultation, col pas assez dilaté, risque de souffrance du bébé, elle me demande si je suis d’accord pour une césarienne. Je lui réponds que si c’est pour le bien du bébé oui. Elle est sortie, revenue avec anesthésiste, chirurgien.
Il était 1h45 du matin, j’étais entrée à 17h la veille. Ils m’ont préparé pour le bloc, à partir de là j’ai commencé à trembler de tout mon corps, des larmes coulaient toutes seules, et ce durant toute l’opération. Je n’avais plus la maîtrise de rien.
Durant l’opération : trifouillage d’entrailles, projection de sang sur le drap dissimulant le bas du corps, sensation d’aspiration des organes (vous voyez les ventouses marron/orange pour déboucher les WC, et bien j’avais l’impression que c’est ce qu’ils utilisaient), je questionnais l’anesthésiste posté à ma tête : “je ressens çà, c’est normal ??”, il ne répondait pas et allait vers je ne sais quel appareil.
Evacuation du placenta : tu viens de subir une césarienne (découpe de peau, chair, nerfs, extraction du bébé, remise en place du bazar, couture) et là une jeune femme adorable t’explique qu’elle va te comprimer le ventre et que çà va faire mal… Ton ventre est déjà un énorme hématome (d’un point de vue sensibilité). Alors elle a beau avoir le sourire et être douce, la douleur est là, les larmes reviennent.
On passe vite fait sur la suite : déplacement pliée en 2 avec perfusion, écoulement de sang à torrent à porter de somptueuses culottes en mailles et des protections hygiéniques de taille et épaisseur que tu te dis : çà y est je suis incontinente ! Et le retour demander en urgence chez toi à cause de menaces proférées à ton en contre et celle de ton fils, par ta voisine de chambre et sa famille.
Pour moi, nous ne sommes pas assez préparée, ni accompagnée pour le premier accouchement. Il y a des civilisations où les jeunes mères étaient entourées de femmes ayant déjà vécu l’évènement. Où sont-elles dans notre société “moderne” ? Quelle place est faite à leur expérience, quels échanges sont créés entre générations ou de même “promotion” ?
Arrêtons de banaliser l’accouchement, d’y mettre des broderies et des nœuds nœuds roses ou bleus à toutes les sauces !
Pour moi, la réalité est que de nombreuses maternités sont des usines où tu te retrouves dans un environnement étranger, en position vulnérable, et que tu n’as pas d’autres choix que de faire ce qu’on te dit et de subir, et que le plus beau jour de ta vie c’est quand tu rentres chez toi avec ton bébé !
Je sais ne pas être la seule à le penser, je connais d’autres mamans qui ne veulent pas d’autres enfants à cause de leur vécu avant, pendant ou après leur accouchement.
On ne défend pas assez nos droits, résultat les situations se répètent, les traumatismes s’installent.
Bonjour
Quand on lit certains témoignages, on a l’impression d’avoir vécu ses accouchements de façon paradisiaque…
Je voudrais mettre l’accent sur 2 choses:
-l’angoisse du corps médical; les soignants sont élevés dans une forme de surdité à ce qui vient du patient et n’est pas “signe” clinique et répertorié et médicalement interprétable. Ils sont détenteurs du savoir, peu partageux, mais anxieux aussi des limites de ce savoir, et conscients de leur responsabilité. Dans ce cas de l’accouchement, ils savent qu’on ne leur pardonnera pas la mort de la mère ou de l’enfant. Ils peuvent paniquer, se dire qu’ils n’ont pas le temps de faire de la psy. Donc il n’y a que ça qui compte et leur grande erreur est de ne pas faire confiance ni équipe avec la femme alors que c’est elle qui est au centre de l’action. Mais l’hôpital, c’est pas ça, c’est le contraire: le patient est passif, et de préférence reconnaissant sinon il emmerde tout le monde et à la décharge des soignants, les conditions ne sont pas réunies pour que cela se passe autrement (formation, organisation, effectifs, projet d’établissement etc etc). Je n’excuse personne bien entendu et au contraire, je pense que les comportements inacceptables et les dysfonctionnements et les incompétences doivent être dénoncés vigoureusement, largement, clairement et par écrit. C’est une façon de reprendre la main. Tant qu’on dit rien, ça continuera; l’hôpital après tout, c’est à nous tous, pour le dire bêtement, c’est nous qui le payons. Je parle d’un point de vue que je connais bien: j’ai été médecin.
-deuxièmement: sur le féminisme j’ai fait partie des gens du Mlac, à l’époque où j’étais étudiante avant 75 et on faisait des avortements par aspiration, illégalement bien sûr. Étudiants et médecins prenaient alors des risques importants pour eux mêmes: celui de ne plus pouvoir exercer. Aprés un gros break de pas mal d’années, et plusieurs enfants, j’ai renoué avec une activité militante au Planning familial. Et je dois avouer qu’à aucun moment la violence obstétricale n’a fait partie de nos combats. Bien sûr les combats ne manquaient pas mais comment avoir bipassé celui là, je ne le comprends pas et je me pose la question d’une prise de conscience pour moi récente. Je crois en effet que la médicalisation de la maternité en pays riche (chez nous) est ressentie essentiellement comme un plus, un progrès, un droit même! et que les comportements inacceptables, l’appropriation du corps des femmes, ne relevaient dans notre esprit que du domaine des avortements car c’est un acte qui déplaît aux médecins et aux sage-femmes. Il est conçu comme allant à l’encontre de leur projet professionnel: “donner la vie”. Or c’est bien en recentrant sur les femmes qu’on voit que l’avortement (ou la contraception) est un moment de leur vie, un choix, pas bien vécu s’il y a désir d’enfant mais sinon parfaitement anodin et sans affect, un soulagement; seule l’attitude médicale et sociale culpabilisante pose problème et fabrique le problème bien souvent. Ensuite, à un autre moment la même femme voudra faire un enfant et ce sera un autre temps, un autre choix mais tout cela doit être vu dans un continuum de vie et aucunement comme une contradiction. Aussi je suis bien d’accord avec votre remarque là dessus mais on est encore loin d’une pensée qui se développe globalement dans ce sens. Elle émerge, tant mieux. Je continue de penser que le féminisme a voulu tellement combattre l’enfermement des femmes dans leur statut de mère qu’il a été aveuglé et l’est encore, et s’est rigidifié sur des concepts: exemple, entre autres, c’est mal de s’arrêter de travailler quelques temps aprés la naissance! Donc on ne se bat pas pour qu’elle (ou il) puisse avoir un salaire décent en cas de reprise différée, et honte à celles qui ne travaillent pas; de quel droit, de quel lieu, avec quelle légitimité dit-on aux femmes ce qu’elles doivent ou pas faire de leur vie? Une injonction de plus! On passe notre vie à subir des injonctions.
Quand à Badinter, elle est capable de certains courages (sans véritable risque)et de grosses conneries. Elle insiste sur l’indépendance et elle a raison, mais pourquoi alors ne pas s’en donner les moyens; pour elle les moyens sont venus directement dans le biberon.
Quel que soit le but premier, la péridurale, dans les faits, est une avancés féministe, puisque ça offre un possibilité supplémentaire, que chacun(e) est libre d’accepter ou non. En tout cas, c’est féministe tant que ça reste un choix, et que la femme est respectée quelque soit son choix (j’ai testé les deux versions, et pour moi, et j’aimerais qu’on me fasse confiance quand je parle de moi et de mon corps, pour mon corps, pour mon cerveau et la manière dont il digère tous les signaux que mes 5 sens et mon intellect lui envoient, y’a pas photo, c’est mieux avec).
L’accouchement – en tout cas la possibilité d’accouchement – à l’hôpital l’est aussi, parce que finalement, dans les pays ou les femmes disposent d’un vrai choix, c’est une plus grande liberté. Et parce que, quoi qu’on dise, tous les accouchements ne peuvent se faire à la maison (j’ai oublié quels sont les critères de sélections mais je pense qu’il y en a). Après, un AAD quand c’est possible et que c’est le souhait des parents (et qu’ils n’habitent pas à trois quarts d’heure de la maternité la plus proche) n’est ni plus ni moins dangereux qu’à l’hosto (de mémoire, les taux de mortalité sont même un encore meilleurs, mais bons, ils ne concernent que les grossesses physio et sans risque, donc c’est absolument normal).
Le seul vrai féminisme, c’est celui d’avoir le choix.
Ce blog a le grand mérite de faire avancer les choses, en tout cas de les pousser tout ce qu’il peut dans le bon sens.
Bonjour Marie-Hélène,
Je souhaite vous remercier pour votre blog et le formidable travail que vous accomplissez.
Jeune maman Française d’un bébé de 2 mois, j’ai lu beaucoup de vos articles et écouté nombre de podcasts de votre blog lorsque j’ai entamé mon deuxième trimestre de grossesse.
C’est ce qui m’a fait prendre un tournant radical concernant la façon dont j’envisageais mon accouchement. Je me suis inscrite dans une maternité pratiquant les accouchements physiologiques et soutenant l’allaitement maternel.
Le résultat a été à la hauteur de mes attentes concernant l’accouchement: un projet de naissance respecté (mention “sans épisiotomie”) et un accouchement sans péridurale.
Malheureusement, j’ai fait une hémorragie de la délivrance, ce qui a donné lieu à une révision utérine pratiquée sous rachianesthésie. Au final, j’ai davantage souffert lors de la révision utérine que lors de mon accouchement (la dame qui l’a pratiqué n’y est pas allée de main-morte, alors que j’avais notifié à l’équipe que je sentais la douleur). De plus, j’ai hérité d’une petite luxation de la hanche (un étrier s’est cassé la figure et pas de chance, mes jambes étaient anesthésiées!)… résultat, je boitille encore.
Je ne pense pas qu’il s’agisse de violences obstétricales, sachant que la révision utérine a été pratiquée pour prévenir une hémorragie et que personne ne pouvait prévoir que l’étrier basculerait vers l’arrière… mais j’ai quand même pensé à vous. Mon utérus n’est pas un fourre-tout dans lequel on farfouille …
Je souhaite également vous faire part de mon vécu concernant l’allaitement.
Le démarrage a été très difficile, sachant que la montée de lait a mis plus de temps que prévu. Mon bébé a perdu un peu trop de poids lors des premiers jours et un biberon de lait infantile m’a été fortement conseillé. Je l’ai très mal vécu, mais j’ai accepté. On m’a ensuite conseillé de donner le sein “à la demande” et des petits biberons de lait infantile toutes les trois heures.
Mon bébé a rapidement repris du poids et est en bonne santé, mais ce que je ne savais pas c’est que pour favoriser l’allaitement, il faut éviter les biberons de complément. Ce n’est qu’après quelques semaines de galère et d’épuisement (nuit hâchées, bébé au sein très très souvent, pleurs, sensation de ne pas avoir de lait, disputes avec ma famille et mon conjoint) que j’ai su comment favoriser un bon allaitement dès le départ, en me documentant sur des sites de soutien à l’allaitement maternel. Mais il était trop tard: face à mon épuisement et à mon mari qui insistait pour donner des biberons de peur que le bébé ne perde du poids, et face à ma propre peur d’affamer mon enfant, j’ai poursuivi l’allaitement mixte.
Aujourd’hui, j’ai davantage de lait, mais j’ai gardé cette habitude de donner des biberons lorsque je suis fatiguée, pour que mon mari prenne le relais une fois dans la nuit.
Ce qui m’amène à dire ceci: si beaucoup de femmes abandonnent l’allaitement maternel, c’est parce-que l’on manque d’informations avant la naissance de notre premier bébé. On ne sait pas que la première nuit est très difficile, mais normale: le bébé tête sans relâche pour stimuler la lactation, ce qui est éprouvant.
C’est aussi parce-que ça peut être épuisant dans certains cas.
Il peut être difficile pour une jeune maman de devoir être disponible H24 pour son nouveau-né, surtout dans notre société où nous vivons nos congés maternité souvent seules, sans forcément la famille à proximité. De nombreuses frustrations peuvent apparaître, en plus du sentiment d’incompétence.
Le fait d’avoir lu Elisabeth Badinter avant la naissance ne m’a malheureusement pas aidé à relativiser ces débuts difficiles.
Et pourtant, je voudrais également remercier Mme Badinter, elle aussi féministe. En ayant lu “Le conflit entre la femme et la mère”, je n’ai pas du tout eu l’impression qu’elle dénigrait l’allaitement maternel. En revanche, je pense qu’elle nous met en garde contre l’injonction à allaiter, qui peut être fortement intériorisée par les jeunes mères et donner lieu à un sentiment d’échec.
J’ai bien conscience qu’il y a là un problème de fond, sociétal, basé sur les inégalités femmes/hommes, en plus de nos modes de vie où nous sommes assez isolé.e.s. Dans ce contexte, je comprends les femmes qui abandonnent l’allaitement maternel.
Donc, en ce qui me concerne: oui à l’allaitement maternel si c’est une source d’épanouissement et de plénitude ! Non si c’est une source d’aliénation et de désespoir.
Oui à la liberté de choix, en somme.
Bien à vous,
Sophie
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