Les violences obstétricales reconnues par le Haut Conseil à l’Egalité

Il y a un an, la Secrétaire d’Etat Marlène Schiappa annonçait devant le Sénat demander au Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes un rapport sur les violences obstétricales, ce qui a médiatisé ce concept et cette réalité. Ce rapport vient de lui être remis ce vendredi 29 juin.

Sur près de 200 pages, le document analyse les actes sexistes durant le suivi gynécologique et obstétrical, en reproduisant de nombreux témoignages, en plongeant dans l’histoire de la médecine et en citant bon nombre de chiffres.

Ainsi, les femmes se soumettent en moyenne à 50 consultations gynécologiques entre l’âge de 15 ans et de 45 ans, que ce soit pour une prescription de pilule, une IVG, une prise en charge d’une fausse couche, le suivi d’une grossesse et d’un accouchement. A chaque consultation, la femme doit se dévêtir, faire examiner son sexe et ses seins, voire subir une pénétration de doigts ou d’objets dans son vagin, ce qui peut causer au minimum de la gêne, un sensation désagréable, et parfois des douleurs. Même si le rapport ne le quantifie pas, il est probable que l’écrasante majorité de ces consultations portent sur des femmes en bonne santé, qui n’ont a priori aucune pathologie. Ma première réaction a été de m’interroger sur la pertinence d’imposer aux femmes (et uniquement aux femmes) un si grand nombre de consultations d’un spécialiste de la pathologie. En effet, aucune personne en bonne santé ne consulte 50 fois au cours de sa vie un pneumologue, un cardiologue, un gastro-entérologue ou un neurologue.

Le rapport englobe en outre les différentes manifestations du sexisme de cette branche de la médecine. Non seulement il reconnaît l’existence et l’ampleur des actes sexistes vécus par les patientes dans la cadre du suivi gynécologique et obstétrical, mais il appelle à lutter contre le sexisme qui gangrène la profession médicale.

Le HCE dresse une liste de 6 types d’actes sexistes relatifs au suivi gynécologique et obstétrical :
1. La non prise en compte de la gêne de la patiente, liée au caractère intime de la consultation ;
2. Des propos porteurs de jugements sur la sexualité, la tenue, le poids qui renvoient à des injonctions sexistes ;
3. Des injures sexistes ;
4. Des actes médicaux exercés sans recueillir le consentement ou sans respecter le choix ou la parole de la patiente ;
5. Des actes ou des refus d’acte non jutifiés médicalement ;
6. Des violences sexuelles : harcèlement sexuel, agression sexuelle et viol.

Cette énumération est intéressante, notamment parce qu’elle cite explicitement le caractère intime de ces consultations, en considérant que la non prise en compte de la gêne de la patiente relève du sexisme. Je regrette pour ma part que la non prise en compte de la douleur ne fasse pas partie de cette énumération, malgré la récurence de témoignages faisant part d’examens gynécologiques douloureux souvent liés à de mauvaises pratiques, voire des actes que je qualifie de torture, que sont les césariennes à vif et les révisions utérines à vif.

Afin de lutter contre ce sexisme, le HCE émet 26 recommandations. Certaines visent à quantifier et analyser l’ampleur des actes sexistes pour objectiver ce phénomène, d’autres visent à adapter la formation des soignants et leur faire intégrer dans leur pratique les recommandations des instances médicales. Une série d’entre elles s’attachent à renforcer les femmes dans la connaissance de leurs droits et dans leur capacité d’être actrices de leur accouchement. Le HCE réclame en outre des changements normatifs pour inclure les discriminations sur base du sexe dans le code de déontologie ou faciliter des procédures en cas de plainte. Au niveau des moyens budgétaires, le HCE invite le gouvernement à augmenter significativement les moyens financiers et humains dévolus aux maternités, à prendre en charge à 100 % par l’Etat les soins dispensés suite à un antécédant obstétrical traumatique et à soutenir financièrement les associations qui accompagnent les femmes de violence sexistes et sexuelles. Il appelle enfin à évaluer et, le cas échéant, à généraliser les maisons de naissances. Vous pouvez lire les 26 recommandations en page 11 du rapport.

Ces recommandations sont pertinentes pour répondre aux violences faites aux femmes dans le cadre du suivi gynécologique et obstétrical. Il manque néanmoins à mes yeux celles qui visent à garantir la liberté des femmes de choisir les conditions de leur accouchement, et notamment le libre choix des soignants et du lieu de mise au monde de leur enfant. A ce titre, il est dommage qu’aucune recommandation n’aborde le problème de l’assurance impayable des sages-femmes qui accompagnent les accouchements à domicile. Interpelée sur ce point, la présidente du HCE, Danielle Bousquet, m’a répondu que le rapport n’avait pas vocation à être exhaustif.

Quelles suites à ce rapport ?

L’existence de ce rapport émis par une instance officielle de l’Etat est déjà en soi une avancée considérable dans la prise ne compte des violences gynécologiques et obstétricales. Son retentissement médiatique montre à quel point il est en phase avec les souhaits de l’opinion publique de voir ces mauvaises pratiques combattues.

L’enjeu est maintenant qu’il ne reste pas lettre morte et que les recommandations soient mises en oeuvre. Pour ce faire, Marlène Schiappa a annoncé la création, conjointement avec la Ministre de la Santé Agnès Buzyn, d’un groupe de travail chargé de concrétiser ces recommandations. Voici la courte interview qu’elle m’a accordée à ce sujet (j’ai sous-titré l’interview vu la mauvaise qualité du son ce dont je suis désolée) :

L’implication de la Ministre de la Santé Agnès Buzyn est de bon augure. Alors qu’elle était dramatiquement silencieuse sur la question des violences obstétricales il y a un an, elle semble aujourd’hui avoir pris conscience de l’ampleur de ce phénomène et de son impact en terme de santé publique. Non seulement elle a accepté d’être auditionnée par le HCE, ce qui est déjà une bonne nouvelle, mais en plus elle s’associe à Marlène Schiappa pour mettre en place des mesures en faveur du respect des femmes dans le cadre de leur suivi gynécologique et obstétrical. Je ne peux que saluer cette évolution de son positionnemment. Je vous invite cependant toutes et tous à rester vigilant.es pour que cette dynamique au sein du gouvernement aboutisse à des changements d’ampleur pour les femmes.

A lire :

Sur le site du HCE : Le rapport sur les actes sexistes durant le suivi gynécologique et obstétrical

La revue de presse sur la sortie du rapport : cliquez ici

Mon interview dans Le Télégramme : Violences obstétricales. Quand une femme dit qu’elle a été violentée, il faut l’entendre

Mon décryptage du rapport pour Marie-Claire : Actes gynéco sexistes : 5 recommandations du Haut conseil à l’égalité femmes-hommes à retenir

Mes réactions pour le Magazine Parents : Violences gynécologiques et obstétricales. un rapport remis ce matin à Marlène Schiappa

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15 Responses to Les violences obstétricales reconnues par le Haut Conseil à l’Egalité

  1. flo says:

    Je ne reviens pas du parcours qui a été accompli depuis ma première lecture de vos billets.
    Je suis sûre qu’au début, on a poussé des hauts cries, qu’on vous a dit que vous deserviez la cause, que vous alliez trop loin, etc. Je crois cependant que ce jour est la conséquence directe du radicalisme de ce blog précisément, qui a osé appeller un viol, un viol. C’est une grande leçon de militantisme en somme 🙂

  2. Nathalie L says:

    Quelle belle nouvelle, certe incomplète et présageant une route encore riche d’actions à mener mais ça fait du bien. Hâte de voir les suites!

  3. bouchara says:

    Bonjour, excellent travail, clair, informatif et efficace.
    Il aurait été toutefois nécessaire de préciser d’emblée que tout cela se passe en France. Non par chauvinisme, vous vous en doutez, mais pour la clarté et la bonne information de toutes vos lectrices et lecteurs. Elles et ils ont eu immédiatement à l’esprit le contexte et le lieu de ces faits, mais il faut toujours penser à celle et celui qui ignorent tout d’un sujet et qui doivent pouvoir le situer immédiatement, sans ambiguïté et sans avoir à chercher un complément d’info ailleurs.
    Car vous êtes lue partout dans le monde francophone. Je fais moi-même circuler au Québec et ailleurs…
    Cela dit très amicalement et je vous renouvelle mes félicitations et mes remerciements,
    Christine B.

  4. Totor says:

    “En effet, aucune personne en bonne santé ne consulte 50 fois au cours de sa vie un pneumologue, un cardiologue, un gastro-entérologue ou un neurologue.” → mais je dois consulter tous les ans un ophtalmo pour avoir une ordonnance pour mes lentilles. Cela dit, un examen de la vue n’a rien de gênant, désagréable ou douloureux, contrairement à un examen gynécologique. Il serait donc temps que les mentalités évoluent…

    • Cleamolette says:

      Votre comparaison ne marche pas tout à fait: vous consultez tous les ans, certes, mais parce que vous avez un “problème” de vue. Ce ne serait pas le cas, autrement. Les examens gynéco (dont vous évoquez à juste titre le caractère plus sensible que d’autres) sont recommandés/imposés de façon systématique, à une fréquence plus élevée encore, et ce même en l’absence de demande de la patiente et/ou de pathologie. J’ajouterais que quand on examine votre vue, vous savez généralement à quoi sert ce que l’on vous fait (vérifier la vision de tel oeil, de loin/ de près etc.). Ce qui est loin d’être le cas en gynéco, où il faut parfois “quémander” une explication à un personnel médical exaspéré par toute patiente ne se laissant pas passivement et silencieusement trifouiller. Bref, mais je pinaille, peut-être, et vous rejoins sur votre dernière phrase : il est temps que les mentalités évoluent.

  5. Myriam says:

    Tellement fière du travail accomplis, enfin on reconnait cette violence que subisse les femmes, comme quoi on ne disait pas n’importe quoi.
    Merci encore une fois, je t’admire

  6. Thank you ever so for you article post.Really looking forward to read more. Much obliged.

  7. Elodie says:

    Bonjour,
    J’ai 27ans, j’ai eu un rdv gynécologique avec une nouvelle gynécologue suite à un déménagement. La gynéco a été très sèche dans son attitude et dans ses propos durant l’examen. Au delà de ça, elle m’a fait un frottis et au moment d’introduire le spéculum, c’était brutal, elle m’a fait très mal, j’avais la sensation de me déchirer. Je lui ai dit et elle m’a répondu qu’elle n’avait pas mis de lubrifiant (Est ce une pratique normale ??) et que j’exagérais ça ne faisait pas mal. J’ai quand même eu des sueurs de douleurs et j’ai failli faire un malaise sur la table. J’ai pris de grandes respirations pour tenir le coup.
    Une fois fini, j’avais les yeux fermés et je continuais de respirer pour me remettre (je pense que qu’on pouvait voir sur mon visage que je n’allait pas très bien). Elle m’a fait un “toucher vaginal” sans me prévenir, de façon tout aussi brutale, la douleur m’a coupée la respiration. Une fois terminé, elle m’a dit que je saignais. Je me suis assise , elle m’a dit “levez les bras” en guise d’explication pour la palpation des seins. J’étais mal à l’aise avec ce que je venais de subir mais je voulais juste que cela se termine au plus vite.
    Elle est retourné a son bureau et j’ai senti du sang couler abondamment entre mes jambes. J’ai demandé quelque chose pour m’essuyer un peu. Elle m’a dit sèchement “non je ne vous donnerai rien, je n’ai rien a vous donner.” Sur le coup j’ai été très heurtée, j’ai dit “Vous êtes en train de me dire que vous allez me laisser repartir avec du sang qui coule le long de mes jambes ?” Elle m’a dit “Bien sur ! vous vous attendiez à quoi ?!”.
    J’ai fondu en larme, c’était la goute d’eau. Elle est revenue vers moi pour me prendre la tension comme si de rien n’était. J’étais en larmes, nue, sanglante, humiliée… Elle a ajouté “Vous pleurez parce que vous saigner ? Vous savez c’est pas grave vous n’allez pas salir la table, je changerai le papier c’est tout”. J’ai fini par réussir à dire que ça n’était pas la raison pour laquelle je pleurais et que c’était son approche qui ne me convenait pas du tout. Elle est repartie a son bureau, m’a dit de m’attraper du papier au dérouleur , de me rhabiller, et elle a dit “La prochaine fois je demanderai à la secrétaire de vous mettre avec une autre gynécologue”. Comme si j’aurais pu reprendre rdv avec elle après ça….
    Aujourd’hui j’ai contacté la direction du centre de santé pour être reçue en entretien.
    J’ai également contacté un cabinet d’avocat (2 femmes) dans le but d’être soutenue dans mes démarches, mais la personne que j’ai eu au téléphone m’a dit qu’il n’y a pas de “préjudice réel”, que c’était normal de subir un toucher vaginal en allant chez un gynécologue, et qu’elle ne comprenait pas ce qui me dérangeait la dedans, et qu’elles ne me suivraient pas, que j’avais plutôt besoin d’un psy que d’un avocat…

    Voilà voilà, je suis assez démunie. J’aimerais savoir si ce que j’ai vécu pourrait être qualifié de viol (car il y a eu pénétration sans consentement et par surprise) ? A qui m’adresser pour être aidée juridiquement ?
    Merci

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